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Une relation abusive crée parfois un attachement traumatique qui lie la victime avec quelqu’un de très problématique.

Un divorce à couteaux tirés, un rapport professionnel tendu, un litige très polarisé, une situation de maltraitance enfantine, l’emprise d’une secte religieuse, le rapport avec un  escroc. Toutes ces relations ont un point commun: une interaction basée sur une violence psychologique, et parfois physique, qui rend impossible l’adoption d’un comportement normal de la part de la victime.

„ Il n’est point dessein de bourreau qui ne lui soit suggéré par le regard de la victime.“

- Pier Paolo Pasolini -

La victime ressent que la clé du problème ne dépend plus d’elle-même, mais de la personne qui abuse d’elle. C’est parce que la victime n’a plus droit à la parole, comme dans le cas d’un enfant maltraité, ou que son avis importe guère, comme celui d’un employé stigmatisé, mis sur une voie de garage, que paradoxalement le lien se renforce avec l’abuseur.

Faux espoirs

Bien que la confiance ait été brisée unilatéralement, la victime nourrit encore l’espoir d’une résolution avec celui qui l’a trahie. Ce raisonnement n’est pas entièrement faux, puisqu’il suffit que le responsable de l’abus reconnaisse ses actes, pour que la victime puisse trouver une issue à son tourment.  Cependant, la plupart du temps, l’abuseur est dans le déni et l’auto justification.

Peut-être souffre-t-il lui-même, car ce genre d’individu n’en est généralement pas à son coup d’essai, et les casseroles qu’il traîne sont probablement nombreuses. Dans ce cas, il s’apitoie volontiers sur son sort et la victime sera tentée de le plaindre.

Peut-être que l’abuseur est toujours dans une logique de vengeance, auquel cas il poursuit son travail de sape. En continuant, en dépit du bon sens, d’accorder sa confiance à quelqu’un qui ne le mérite plus, la victime s’illusionne. Elle croit au changement et à la rédemption, alors que l’abuseur est à mille lieues de suivre cette voie. Le temps qui passe entretient cet espoir, car l’idée de jours meilleurs reste un objectif souhaitable et envisageable.

Ainsi l’otage qui croit toujours à sa libération, au même titre que sa famille, sont profondément dépendants du kidnappeur. Même après sa délivrance, si elle intervient, l’ex-otage continue d’entretenir un rapport psychologique avec son geôlier. Dans de nombreux cas, la patience des victimes abusées est admirable.

Dépendance de la victime

Les observateurs extérieurs, d’autant plus s’ils n’ont jamais vécu ce genre de situation, ressentent immédiatement que cet attachement est totalement déplacé et malsain. La dépendance de la victime perpétue le cycle de l’abus. Par conséquent, elle continue de subir la violence, la peur et le danger qui imprègnent ces relations. L’indulgence et la gentillesse qui animent la victime ne reçoivent en règle générale aucune reconnaissance de la part de l’abuseur. La frustration, la douleur et le chagrin de la victime ne remettent cependant pas en question son attachement moral. La victime est disposée à prendre sur elle une problématique qui, en fin de compte, ne la concerne pas.

Après s’être extraite de ce genre de relation toxique, la victime pourrait laisser à son triste destin son abuseur.  Elle pourrait faire l’effort de tourner la page, mais pour différentes raisons, qu’elle ne s’explique parfois pas elle-même, elle n’y parvient pas.

Pourquoi l’adepte de la secte qui a perdu tout contact avec les siens et qui subit quotidiennement la violence psychologique d’un gourou psychopathe, continue de lui vouer allégeance et de lui apporter son dévouement total ?
Pourquoi l’otage va-t-il s’opposer à ses libérateurs au risque de perdre la vie ?
Pourquoi le conjoint d’un alcoolique, qui constate sa déchéance et son manque de volonté à changer, va continuer de l’aimer ?

Lien traumatique

Quels sont les signes qui confirment l’existence d’un lien traumatique ?

1. Lorsque des pensées obsessives se rapportent à une personne qui a abusé de vous, bien que vous n’ayez plus de rapport avec elle depuis longtemps.

2. Lorsque vous manifestez la volonté de poursuivre un rapport avec des personnes qui vous ont blessé et dont vous ressentez intuitivement que le contact risque de produire encore plus de douleur.

3. Lorsque vous êtes encore disposé à aider quelqu’un qui vous a abusé.

4. Lorsque vous cherchez à négocier avec des personnes qui ont profité de votre bonne foi et qui vous ont régulièrement trompé.

5. Lorsque vous continuez à vous justifier ou à vous expliquer avec des individus qui vous ont calomnié sans aucune gêne.

6. Lorsque vous cherchez à maintenir un lien affectif avec des personnes qui jouent avec vos sentiments.

7. Lorsque vous êtes incapable de prendre vos distances de personnes problématiques qui vous ont fait souffrir.

8. Lorsque vous continuez de faire confiance à des personnes qui manifestement ne remplissent pas leurs engagements.

9. Lorsque vous croyez rendre service à quelqu’un en ne dénonçant pas ses actes abusifs.

10. Lorsque vous cherchez à raisonner une personne qui n’assume aucune responsabilité pour son comportement abusif.

Parfois la relation traumatique est due à l’existence d’un enfant manipulé par un parent abusif. Il s’agit d’une prise d’otage dans laquelle celui qui cherche le contact, le parent stigmatisé, est bien conscient du caractère abusif de la situation.

S’il n’y avait pas le destin d’un enfant en jeu, ce parent aurait renoncé à tout contact avec son ex-conjoint. Mais il y a une prise d’otage, parfois précédée d’un enlèvement parental. La situation est d’autant plus préoccupante et déstabilisante que, contrairement à un kidnapping conventionnel, le ravisseur est le parent de l’otage. Son acte n’est donc pas obligatoirement condamné. Au contraire, ce genre de parent bénéficie même de solides appuis qui lui permettent de continuer sa politique de terre brûlée et de racketter les services sociaux.

Personnalité de l’abuseur

Bien que cette personne agisse en toute impunité avec l’aide d’intervenants incompétents ou irresponsables, certaines caractéristiques de sa personnalité peuvent être mises en évidence par quelqu’un d’attentif.   

1. Cette personne n’en est pas à son coup d’essai, elle a un passé relationnel assez trouble et mouvementé.

2. Cette personne n’est jamais responsable de ce qui lui arrive, c’est toujours de la faute aux autres.

3. Cette personne a tendance à être quérulente et à exiger, à travers des procédures juridiques, des dommages et intérêts, pour les torts qu’elle prétend avoir subis.

4. Cette personne n’hésite pas de recourir à une activité illégale pour poursuivre ses objectifs.

5. C’est manifestement cette personne qui fait la loi. Elle n’a aucune intention de se plier aux décisions de justice lorsqu’elle est prise sur le fait.

6. Cette personne ne supporte pas la routine, elle a besoin d’excitations et d’adrénaline.

7. Cette personne sait séduire en manipulant les autres et en leur faisant avaler des couleuvres.

8. Cette personne peut sembler très cultivée et subtile, alors qu’elle est en réalité vide affectivement et pauvre spirituellement.

9. Cette personne utilise ses atouts sexuels pour son avancement personnel.

10. Cette personne n’est pas très stable professionnellement. Elle est souvent en conflit avec ses collègues de travail et ses employeurs.

11. Cette personne ne trouve rien d’anormal à critiquer ses proches à ses amis. Elle se confie volontiers avec eux et partagent des secrets, dont elle tient dans l’ignorance les personnes concernées.

12. Cette personne adore se faire passer pour une victime.

13. Cette personne souffre d’une ou plusieurs addictions.

14. Cette personne n’a aucune difficulté à avoir plusieurs partenaires sexuels simultanément. 

15. Cette personne est capable de mener des vies parallèles, de tromper son entourage sans apparemment sentir la moindre gêne, en conservant un aplomb étonnant.

16. Cette personne est très suspicieuse. Elle est toujours sur ses gardes pour se défendre des mauvaises intentions qu’elle prête aux autres.

17. Pour donner un peu de piment à sa vie cette personne a besoin d’avoir des ennemis. Elle provoque volontairement des disputes.

18. Cette personne met en scène des psychodrames qui lui servent à extérioriser ses multiples personnalités et à projeter ses propres tendances.

19. Cette personne est très susceptible et prend l’humour pour de la moquerie.

20. Cette personne adore diviser pour régner.  Elle raffole de monter les membres de sa propre famille les uns contre les autres. Elle se servira de ses propres enfants pour régler ses comptes.

21. Cette personne est convaincue que la meilleure défense est l’attaque. En règle générale, elle n’hésite pas à foncer droit dans le tas, sans penser le moins du monde aux dégâts collatéraux. Elle implique dans ses conflits tous ceux disposés à croire ses balivernes.

22. Cette personne est capable de vous faire la tête de manière obstinée pendant des semaines, des mois et des années, uniquement parce que vous avez eu un mot de travers à son égard, qui était en réalité une observation justifiée.

23. Lorsqu’elle a pris une décision, cette personne ne revient jamais en arrière. Elle ne se remet jamais en question, même après avoir agi de la manière la plus cruelle et injuste.

24. Cette personne ne respire pas le bonheur et ne rend pas les autres heureux.

Lorsque ceux qui ont été abusés par ces personnes décident de les confronter afin de les mettre face à leurs responsabilités, voici les attitudes qu’ils rencontrent:

1. Ces personnes choisissent de couper toute communication pour ne pas avoir à se justifier. Elles font montre d’une bouderie excessive, d’un silence obstiné et d’une défiance constante. Quand elles ne peuvent plus soutenir le regard de leurs interlocuteurs, soit elles se ruent sur eux, soit elles se détournent, claquent la porte et partent sans laisser d’adresse.

2. Ces personnes vous accusent exactement de ce qu’elles vous font subir. Elles retournent admirablement les cartes en vous prêtant toutes les mauvaises intentions qu’elles ont manifestées à votre égard.

3. Ces personnes prétendent que vous les harcelez et que vous êtes menaçant, voir violent. Elles n’hésiteront pas à prendre comme témoin le premier venu, même si cette personne ne connaît rien de la situation.

4. Ces personnes ne font jamais amende honorable et n’ont jamais le moindre regret.

Dilemme moral

Le meilleur service que les victimes des agissements de ces personnes abusives peuvent se rendre est bien sûr de ne plus avoir de rapport avec elles. Mais lorsque vous avez des enfants avec ces personnes et qu’ils subissent les mêmes manœuvres dans l’indifférence générale, que pouvez vous faire ?

Il s’agit d’un vrai dilemme moral. Pour votre santé personnelle, vous êtes sans doute prêt à renoncer à tout contact avec cette personne, d’autant plus que vous avez probablement eu la possibilité de mesurer tout l’avantage d’en être éloigné suite à votre séparation; dont par ailleurs vous n’êtes pas obligatoirement l’initiateur, puisque votre dévouement, ainsi que votre naïveté, n’avaient pas de limites. N’oublions pas que vous aimiez ce conjoint, et pour vous, vos enfants ne sont pas le fruit du hasard.  Vous ne pouvez donc pas vous laver les mains comme Ponce Pilate, et laisser vos enfants à leur triste destin, sous la coupe d’un tel parent.

Tentative de résolution

Votre marge de manœuvre est très étroite, comme elle le serait avec n’importe quelle personne perturbée.  Toutefois la situation se complique par le fait que ce parent sait que vous ne renoncerez pas. En effet, lâcher prise, alors qu’il y a un risque réel que vos enfants soient marqués à vie ne serait pas la bonne solution. 

1. Non confrontation

Avant toute chose, notons que la confrontation directe, qui ne fait que renforcer ce parent dans sa croyance maladive d’être attaqué est bien souvent totalement inefficace. Malgré votre décision de privilégier la non confrontation,  il restera tout à fait convaincu que vous n’attendez que le moment où il baisse la garde, pour lui damer le pion.  Lui enlever cette idée de la tête est voué à l’échec. Toutes vos tentatives de médiation vont se solder par une fin de non-recevoir. Cependant, en constatant que vous restez parfaitement maître de vos nerfs, ce parent doit bien finir par se rendre à l’évidence. Soit il a affaire à quelqu’un de plus retord que lui, et sans doute ne manquera-t-il pas d’en tirer cette conclusion, soit quelque chose lui échappe.  Quoi qu'il en soit la non confrontation le fait cogiter, ce qui est toujours mieux que les réactions chaotiques dont il est coutumier.

2. Maintenir le contact

Avec le temps son agressivité et sa malveillance ne vous atteignent plus, vous parvenez ainsi à maintenir un certain contact avec vos enfants. Même s’il est à sens unique. Même si vous êtes totalement ostracisé, car les esprits de bas étage ne manqueront pas de se moquer de votre « dépendance », ne comprenant pas le sens de votre démarche, vous parviendrez malgré tout à atteindre votre seul objectif qui est de pouvoir dire, ou écrire à vos enfants, que vous les aimez. En imposant un style dénué de toute agressivité, axé sur le non jugement et le questionnement, vous vous mettez dans la position d’un interlocuteur à l’écoute. Il sera donc très difficile à ce parent, qui vous dénigre, d’éluder perpétuellement les questions qui concernent vos enfants, dont il prétend être le meilleur défenseur.  

3. Imposer une communication ouverte

En d’autres termes, vos manières présentes ne justifient plus l’exclusion perpétrée.  Ce parent peut certes continuer de se référer à des moments passés, où vous étiez excédé par ses chantages continuels. Peut-être avez vous  élevé la voix en ces occasions, ou même intimé à ce parent de cesser  son manège. Peut-être avez vous été traumatisé par un enlèvement parental et manifesté votre dépit avec des mots très durs à l’égard de ce parent.  Si c’est le cas, croyez bien que ce parent ressortira ces moments d’égarement, même s’ils se sont produits il y a des années, dans des circonstances douloureuses !
Cependant, ces justifications ne sauraient légitimer une mise à l’écart définitive. D’autant plus que ce parent n’aura, quant à lui, jamais manqué de faire preuve de violence morale à travers ses refus répétés de répondre à vos lettres d’invitation.  Parfois, envers ses propres enfants insoumis, ainsi que d’autres personnes qui lui barrent la route, il aura été brutal, n’hésitant pas à allonger une gifle ici et là pour les faire taire. Il pourrait bien sûr lui être reproché sa violation du droit des enfants ainsi que du vôtre, vous interdisant unilatéralement  de pouvoir jouer un rôle dans leur vie. D’autre part, se trouver rétrospectivement des excuses devient particulièrement ardu, lorsque l’abus s’est répété sur un long intervalle, sans aucune justification crédible.

4. Ne pas trop exiger

Souvent une personne problématique a tellement de difficultés qu’il est illusoire d’espérer une amélioration rapide. Elle ne peut manifestement pas donner ce qui lui fait défaut. Savoir se contenter, et faire en sorte que vous ne soyez plus son ennemi principal, est déjà un grand pas. Il ne faut pas espérer qu’elle change, mais plutôt qu’elle choisisse un autre bouc émissaire que vous, sur lequel elle déversera sa frustration. En principe, si vous êtes patient et fidèle à votre stratégie de non confrontation, il est à peu près sûr que les désillusions actuelles de cette personne dissiperont provisoirement les problèmes que vous avez eu avec elle. Ne gâchez donc pas l’occasion qui se présente en faisant des prétentions exagérées, même si elles sont parfaitement légitimes.  Coulez-vous dans le moule de la personne attentive et bien disposée, tout en faisant preuve d’une grande indulgence. Si cette personne perçoit en vous un confident, c’est gagné.
Il est même possible d’envisager de vous remettre avec elle. À vos risques et périls cependant, car rien ne vous prouve que la situation conflictuelle ne se reproduira pas.

Ultimes recommandations

1. Pensez à votre santé

Si vous aspirez à avoir un peu de sérénité dans une relation affective, vous êtes à la mauvaise enseigne avec ce genre de personnes. Il n’y a rien de plus exténuant que de vouloir faire boire un âne qui n’a pas soif. Vous allez perdre une énergie folle à essayer de changer le cours des choses. Votre santé et joie de vivre risquent d’en pâtir. Accordez-vous des moments de détente et ne perdez surtout pas une occasion de vous adonner à vos passe-temps favoris

2. Essayez toujours de tirer le meilleur des autres

Le pire criminel n’est pas dénué d’humanité. Faire preuve d’empathie, c’est aussi faire l’effort de comprendre le fonctionnement de personnes apparemment cruelles et insensibles. En réalité, chacun essaie à sa manière de rendre le monde un peu plus tolérable. Certains y arrivent mieux que d’autres, alors que les individus qui nous empoisonnent l’existence n’y parviennent tout simplement pas. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir aussi essayé. Un petit coup de pouce a une personne qui vous empoisonne l’existence,  de manière peut-être involontaire, n’est donc pas à négliger, si vous souhaitez découvrir ses qualités cachées.

3. Apprenez à transformer une mauvaise expérience en enseignement constructif

Parfois il suffit de considérer le problème sous un autre angle, pour s’apercevoir des opportunités d’évolution et de changement qu’il représente. Ces personnes vous offrent une occasion unique de pratiquer l’amour inconditionnel !

4. Privilégiez le gain réciproque

La peur de tout perdre est souvent le sentiment de ceux qui s’accrochent désespérément au statu quo. En réduisant vos prétentions, vous ne représentez plus un danger permanent.  Parfois, il faut savoir perdre pour gagner, et lorsque l’on gagne, il faut aussi offrir une issue acceptable à l’autre.

5. N’oubliez pas d’être heureux

Vivez au présent et goûtez aux joies de l’existence avec des personnes qui en valent vraiment la peine. La vie est dure, mais ne la rendez pas inutilement difficile, en vous focalisant sur des problèmes insolubles, qui auraient le don de rendre morose n’importe quel boute-en-train.

6. Protégez-vous

Prenez quelques précautions pratiques pour vous tenir éloigné des personnes, dont le potentiel de nuisance est susceptible d’empoisonner l’existence de la personne la plus équilibrée.