Les témoignages de parents affirmant être victimes d'aliénation parentale ne permettent souvent pas de se faire un avis objectif de la situation et de déterminer avec certitude que l'auteur du récit est exempt de tout reproche.
Aucun observateur ne peut raisonnablement juger d'un problème si son énoncé n'est pas clair. Le plus grand risque est de confondre un parent aliéné avec un parent aliénant. Par ailleurs, il ne faut jamais écarter l'hypothèse que nous avons affaire à deux personnes aliénantes, et par conséquent aliénées à tour de rôle.
„ Les affaires d’honneur sont des cases hermétiques auxquelles ont seuls accès les maîtres du drame. “
- Gabriel Garcia Marquez -
Les spécificités suivantes se retrouvent dans ces témoignages décousus manquant singulièrement de mise en perspective.
1. Manque de preuves
Les éléments factuels font défaut et ne permettent pas de corroborer
les accusations portées contre un parent.
2. Vision dichotomique
C'est noir ou blanc. L'autre conjoint est forcément un monstre
manipulateur qui fait vivre un enfer à ses enfants et au parent
supposément aliéné.
3. Victimisation
Tout ce qui arrive dans la vie de la "victime" est de la faute de l'ex
conjoint, même si ce dernier vit sur un autre continent. La douleur de
genre de parent dépasse celle de ses propres enfants, qui sont
pourtant censés êtres les principales victimes de l’aliénation. En
réalité, ce parent prétend, même lorsqu’il est confondu, que l'abus
qu'il a fait subir à ses enfants en dénigrant systématiquement l'autre
parent, a été réalisé pour leur bien.
4. Aucune remise en question
Les parents accusateurs ne se reconnaissent aucun défaut. Le lecteur a
vraiment l'impression qu'ils n'ont rien à se reprocher.
5. Vengeance
Les solutions proposées visent toujours à se venger de l'autre parent.
Que ce soit suite à une procédure judiciaire, ou à travers leurs
témoignages et leurs attitudes avec leurs enfants et leurs proches,
ces parents cherchent à prendre une revanche.
Contre quoi?
La question mérite d’être posée lorsque l'on constate leur
détermination et leur zèle, toujours aussi vivaces, après de
nombreuses années de chicane. Ceci, malgré le fait que le "coupable"
de leur malheur est la mère ou le père de leurs enfants et que ces
parents vindicatifs n'ont plus aucun contact avec lui. Pour ces
parents, c'est une question vitale d'imposer leur point de vue et de
remporter la mise. Pour ce faire, ils sont prêts à compromettre
gravement la relation que leurs enfants pourraient avoir avec l'autre
parent.
Voyons la manière de communiquer de ces parents :
"Ma vie n’est que chagrin et désespérance."
Lorsqu'un témoignage commence par un tel constat, on s'attend naturellement à découvrir un état de douleur lancinante qui n'offre aucun répit. Cela implique forcément une incapacité de réagir pour changer le cours de son destin. Pour qu’une telle impuissance se justifie, elle ne peut que provenir d'une force implacable s'exerçant contre la victime, la privant ainsi de sa liberté, de sa capacité d'agir et la conduisant donc au fatalisme. Or cela n'est pas le cas dans la situation décrite. L'autre hypothèse expliquant ce sentiment d'impuissance est donc une fausse perception du problème.
"Mon fils, ma fille, mes batailles."
D'emblée, ce genre de parent attribue à la justice la responsabilité d'avoir été écarté de la vie de ses enfants. Selon ce parent plusieurs femmes, dont une psychologue, sont à l'origine de l'aliénation parentale subie. La reconnaissance de ces dysfonctionnements, de la part d'autres intervenants externes, n'a par contre pas pu inverser le cours des choses. Pour quelles raisons ? Aucune précision n’est fournie, si bien que le diagnostic dressé n’est probablement pas partagé par toutes les parties.
Il prétend ensuite que sa vie de père a été anéantie par son
ex-compagne, qui a voulu se venger de son choix de se séparer d'elle.
Les circonstances de cette séparation ne sont pas décrites et
pourraient peut-être expliquer l’animosité de son ex à son égard.
Ensuite, ce père explique qu'il a créé un pseudo sur un site de
discussions sur Internet afin d’entrer en contact avec sa fille, se
faisant à cet effet passer pour un adolescent de 15 ans. Il affirme
que ce moyen de contact lui procura "un profond bonheur" et que malgré
la supercherie découverte par sa fille, celle-ci en retira
probablement du plaisir, tout comme lui.
Qu’en sait-il, s’il n’a pas eu son approbation pour qu’il agisse
ainsi ?
"Que de nuits de cauchemars, de chagrins immenses, qui déchiraient mes entrailles et mettait mon cœur en lambeaux."
Grâce à une éducatrice qui le tire d'une phase suicidaire, il voit plusieurs fois ses enfants en cachette, sans que leur mère le sache. Une période d'éloignement suit, sans que l'on sache vraiment pourquoi, puisqu'il semblait avoir renoué le contact avec sa progéniture. Il perd de vue ses enfants, alors qu'il habite à deux pas de chez eux. C'est finalement sur les réseaux sociaux qu'il apprend que son fils a des problèmes avec la drogue.
Il est significatif que ce genre de parent ramène tout à l’aliénation
parentale pour justifier non seulement tous leurs états d’âme, mais
également les difficultés de leurs enfants. Aucune autre cause est
fournie pour expliquer toutes sortes de problèmes que l’on peut
rencontrer dans la vie.Ce père décide alors de refaire surface en
imaginant tout un stratagème pour contacter ses enfants, en l’absence
de leur mère. Au lever du jour, dans la rue, près du domicile de ses
enfants, il se poste dans l’embrasure d’une porte attendant que le
véhicule de leur mère parte, pour oser aller frapper à leur porte. Ce
manège finit par contrarier son fils, qui semble se méfier de sa
propre sœur, et lui demande de l'attendre dehors.
Finalement, le père doit se rendre en Nouvelle Guinée et y invite son
fils. S'ensuivent ensuite des retrouvailles avec son fils, à 10 000 km
de chez sa mère.
On imagine que ce dénouement heureux est la fin du récit, mais un
flash-back nous ramène au moment où son ex-femme décide de l'écarter
définitivement de la vie de ses enfants. Il était en train d'organiser
sa rencontre hebdomadaire avec ses enfants. Le répondeur lui dit:
«Vous êtes bien chez … (prénom de son ex-compagne, prénom de sa fille
et prénom de son fils.) Ce répondeur filtre dorénavant les appels.
Merci d’indiquer votre nom avant que nous décrochions.»
Il constate qu'il est désormais persona non gratta. Il se rend alors au domicile de la mère des enfants, et celle-ci appelle la police, qui l'amène au poste pour tentative de violation de domicile.
Quelque temps après, ce sont ses enfants qui lui apprennent qu'ils ne
veulent plus le voir.
Malgré cela, ce père va essayer régulièrement d’entrer en relation
avec ses enfants. Il se fait d'abord éconduire par sa fille qui, en
présence d'une amie, lui dit de manière cinglante: « Dégage ! »
"Je n’eus jamais une attitude agressive ou fâchée. Et si elle me
voyait, je lui souriais. Juste pour lui rappeler mon existence et mon
amour, mon affection toujours disponible. Et cela, durant des mois, et
des années qui ont suivi !"
Ce père va pourtant continuer de manifester sa volonté de nouer un contact avec ses enfants, simplement pour leur faire comprendre qu'il existe. Était-ce pourtant la bonne stratégie dans le cas présent ?
"Le plus vital de la vie d’un être humain m’a pourtant bien été enlevé, comme un viol, c’est un viol, impuni à jamais !"
Les derniers mots de ce père mettent en évidence un profond
ressentiment.
Comme solution au problème de l'aliénation parentale, cet homme
propose de judiciariser la réponse légale, sans toutefois apporter de
réponses claires sur les moyens d'y parvenir et notamment sur la façon
de prouver autant sa bonne foi que les manœuvres aliénantes de l'autre
parent.